Souvenirs d’enfance dans le Sud
“Dans le romarin, il y a la terre, il y a le parfum des pins et celui du soleil, il y a même un peu de menthe, juste pour te donner l’idée du voyage”.
De mes souvenirs d’enfance les plus tendres, il me reste des images de glycines tombantes de l’abri de canisses au dessus d’une vieille table de bois peinte et repeinte maintes fois. Le bleu cyan écaillé à ses pieds laissait entrevoir des traces de peinture blanche ou orange qui l’avaient précédé. Les chaises disparates encerclait cette table où ma grand-mère, à l’ombre du soleil de l’après-midi, plaçait ses cartes pour une traditionnelle réussite.
Le jeu portait bien son nom. Elle ne perdait jamais, du moins jamais vraiment en s’arrangeant un peu avec le sort et avec une mauvaise foi qui frôlait le génie. Une fois la dernière carte posée, elle s’adossait sur sa chaise l’air satisfaite et reprenait une gorgée de son infusion de romarin. Je me souviens comme si c’était hier de son sourire et de son regard pétillant.
Si je conserve quelques images, ce sont surtout les odeurs qui habillent mes souvenirs, celles de la glycine, du soleil sur les canisses et celle du romarin dont la fumée s’échappait de sa tasse en dansant. Je me souviens de ce parfum aussi parce qu’elle me l’avait montré, à l’arrière de la maison, aux pieds de ses pierres blanchies de soleil, les buissons touffus d’un vert intense sentaient comme son infusion.
Ma grand-mère, elle était comme une héroïne de Pagnol, l’humanité incarnée et indissociable de sa maison, de son Sud, de son soleil et de son romarin. “Evidemment que j’aime la lavande, je suis du Sud”, disait-elle, “mais le romarin, c’est autre chose. La lavande, c’est bien pour le linge, le romarin, c’est bon pour le corps et pour le coeur”.
“Dans le romarin, il y a la terre, il y a le parfum des pins et celui du soleil, il y a même un peu de menthe, juste pour te donner l’idée du voyage”. Elle en parlait comme un amour de toujours.
C’était un autre temps que celui des lents étés de mon enfance. A l’époque, les journées étaient rythmées par le soleil. Ma grand-mère n’avait pas de montre, pas de pendule. “A quoi cela me servirait ?”. Finalement, personne ne trouvait d’arguments pour la contredire. Sans doute avait-elle un peu raison. Il lui fallait peu de choses pour être heureuse, je crois que j’en faisais partie, moi, ses cartes, son Sud et son romarin.
Aujourd’hui, le Sud n’a plus vraiment le même parfum. Petit à petit, je quitté mon habit d’enfant. Je n’ai retrouvé nulle part le mélange des odeurs. On ne peut pas revivre le passé et sans doute que les souvenirs se sont embellis avec le temps. Mais on a tous besoin de racines, de son histoire et d’un moyen pour s’y connecter.
Plus encore, je suis sûr que comme moi, vous avez parfois besoin de ralentir, de faire une pause. Une infusion de romarin, c’est idéal, c’est un voyage pour tous, quelques minutes d’attente pour laisser le Sud parfumer l’eau.
Alors, souvent, je m’assieds à la petite table de mon balcon, à l’heure où le soleil fait ralentir les hommes, j’enlève ma montre et je pose un vieux jeu de cartes à côté d’une infusion de romarin.
Antoine R // 28.08.2021 // Aubagne
Infusion
Bien accueilli dès les premiers frimas d’automne, le thym libère une saveur légèrement mentholée et boisée de pin. Il peut s’inviter en cuisine que consommé en infusion pour sa puissance aromatique. Une plante de base en herboristerie reconnue pour ses qualités incontournables.